Le jour de l'enlèvement d'Ilan Halimi, des étudiants ont été témoins de ses cris. « Au secours, aidez moi ! », a hurlé le jeune homme. C'est ce qu'ils sont venus raconter à la barre ce mardi. Ils ont aussi expliqué avoir eu des doutes ce jour-là, ignorer s'il s'agissait d'une véritable détresse ou s'il était question d'un jeu. Une jeune femme a même expliqué à la cour avoir vu quelqu'un qu'elle pensait être « une femme », portée par dessous les aisselles par une personne, et par les pieds par une autre. Certains ont appelé la police. Il était trop tard lorsque celle-ci est arrivée sur les lieux.
Dans l'après-midi de ce mardi, la cour a entendu Daouda Fofana, frère aîné de Youssouf. Celui qui s'était trouvé dans la salle d'audience alors qu'il n'avait rien à y faire, puisqu'il n'avait pas encore témoigné. Il est arrivé à la barre très en colère, regardant son frère droit dans les yeux. La Présidente Nadi Ajjan a dû le rappeler à la règle, on s'adresse à la cour, pas à l'accusé. Youssouf Fofana a rigolé, pendant que Daouda déclarait : « Que voulez vous que je vous dise ? C'est une honte, une honte pour ma famille, une honte pour tous les Fofana du monde. » Youssouf Fofana a pris la parole, pour répéter cet antisémitisme qu'il assène impunément depuis des jours : « Moi, je suis fier. J'ai tué un juif ». Daouda a raconté quel genre de petit garçon avait été son frère, « un bon petit » qu'il emmenait de temps en temps au parc. Puis un adolescent que personne dans la famille n'avait jamais entendu tenir de propos antisémites. Il a situé le changement, la véritable fracture, à sa sortie de prison en 2001. « Ca l'a changé, après son séjour, ce n'était plus le même. » Youssouf Fofana est encore intervenu pour dire que sa famille l'avait trahi, en le dénonçant à l'époque de l'enlèvement et du meurtre d'Ilan Halimi. Il a soutenu que Daouda l'avait même appelé, alors qu'il avait fui en Côte d'Ivoire. Sur quoi, le frère aîné a bondi : « Tu as les preuves que je t'ai appelé ? C'est pas moi qui t'ai appelé, c'est le diable. Et tu vas le rejoindre, le diable ! Tu vas brûler en enfer comme tu as brûlé ce pauvre innocent. Tu es un assassin, crève, tu vas crever. Bâtard ». En échange de quoi, l'accusé, persuadé qu'un comité de soutien à son sort s'est constitué de par le monde entier, a menacé son frère : « Je vais mettre ta photo sur internet et tu vas crever aussi. »
Entre-temps, Tifenn G et Yalda ont redit à la cour comment elles ont participé à l'enlèvement d'Ilan Halimi. Tifenn G. a dit que Fofana lui avait demandé une fille. Qu'elle a repensé à Yalda. Qu'elle se sentait le devoir de la soutenir, la sentant très angoissée après l'enlèvement. C'est pour ça qu'elle l'avait alors rejointe, pour la rassurer. Une semaine plus tard, elle a raconté à la cour avoir demandé des nouvelles du jeune homme à Youssouf Fofana. Tout allait bien. Et plus tard, elle avait su que les choses duraient, en entendant Yahia K. confier son ras-le-bol, son désir de tout laisser tomber, dans une cage d'escalier.
Yalda, elle, a dit avoir trouvé Ilan Halimi « sympa » au rendez-vous. Et même : plus ça allait, moins elle avait envie de le conduire jusqu'au lieu de l'enlèvement. Sauf qu'elle l'a fait. Ensuite, elle est allée dîner au restaurant, avec un type rencontré sur internet. Ils ont fini à l'hôtel. Fofana a tout payé. Et Yalda ne se souvient de rien, juste s'être réveillée avec des verres près d'elle. A la barre, le type lui s'est rappelé un peu gêné avoir eu un rapport avec la jeune femme, qui lui avait effectivement vaguement parlé de son plan pour se faire de l'argent, de l'enlèvement. Ca ne l'intéressait pas beaucoup.
Jean-Christophe S. a à son tour raconté que Fofana était venu le trouver pour lui demander de participer à un coup, l'enlèvement d'un commerçant aux riches parents. A l'époque, Jean-Christophe S. avait conquis le territoire de Bagneux pour son trafic de stupéfiants, il avait réussi à s'y imposer facilement. Il pense que c'est devant ce constat que Youssouf Fofana a pensé qu'il pouvait compter sur lui, s'est dit qu'il assurait suffisamment. Le jour de l'enlèvement d'Ilan, il s'est caché derrière des buissons, et quand Yalda a prononcé le mot-clé, Jean-Christophe S. a bondi sur Ilan Halimi. Il se souvient avoir donné un coup pour le maîtriser. L'avoir mis dans le coffre de la voiture. L'avoir déposé dans l'appartement, à Bagneux. C'était dans la nuit du vendredi au samedi, et il a dit à la cour qu'il était alors prévu avec Fofana qu'il revienne le lundi. Pour récupérer son argent, et relâcher Ilan dans un lieu public.
P.S : Ce procès se tient à huis-clos. Aussi ce blog est-il écrit à partir d'informations recueillies auprès de personnes qui assistent à l'audience, et dont, bien entendu, nos taisons les noms.
http://elsa-vigoureux.blogs.nouvelobs.com/archive/2009/06/03/la-honte-du-frere-de-fofana.html
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