L’offensive islamiste se fait aussi dans le cadre universitaire. L’intimidation repose en général sur l’accusation de racisme et d’intolérance : l’appropriation et le détournement du discours humaniste servent alors à faire taire les intellectuels critiques et à embrigader ceux qui sont assez naïfs pour croire à cette rhétorique. Cet article apporte deux témoignages sur l’université britannique et la supposée liberté de parole qui peut exister dans le monde universitaire. Des exemples à méditer… (J.S.)
Pajamas Media
Texte original anglais : "Truth on Trial. Anti-Israeli, Pro-Islamist Propaganda and the London School of Terrorism", by Phyllis Chesler (1)
Traduction française : Jean Szlamowicz
J’ai été élevée en pensant que la vérité existait et que, pour reprendre les paroles de l’immortel John Keats,
« la beauté est vérité et la vérité est beauté — c’est là tout ce que l’on peut savoir sur terre et tout ce que l’on a besoin de savoir »
(Cf., ci-dessous, Ode sur une urne grecque).
Certes, pour beaucoup, Keats est un poète blanc mort. Aujourd’hui, l’élite intellectuelle et ses suiveurs considèrent que la vérité n’existe pas, qu’il y a beaucoup de vérités en –isme, que tout est relatif, que — comme dans le Rashomon (2) de Kurosawa — les gens ont des points de vue différents, et que tous ces points de vue ont la même valeur.
En plus de cela, on a appris à la population à vénérer des mensonges, des projections paranoïaques, des renversements linguistiques et des images travaillées par Photoshop. On fait une production industrielle d’accusations qui passent, dans toutes les langues du monde, pour paroles d’évangile : les Israéliens sont des nazis qui ont tué un enfant de 12 ans, Mohammed al-Dura, dans les bras de son père, ils ont « perpétré un massacre » à Jénine, construit « le mur de l’apartheid » en Cisjordanie, et sont responsables de « l’holocauste de Gaza ».
Ce ne sont que des mots, peut-être ? Cela ne fait aucun mal ? Chacun a le droit de penser ce qu’il veut ? Il faut alors remarquer que le monde entier sympathise avec Gaza et la Palestine, privilège dont ne jouit aucune autre région ou population du monde. C’est assez logique. Depuis un mois, le New York Times est allé jusqu’à publier deux articles par jour sur le sujet, avec des photos de grande taille. Sans parler des libres opinions, des éditoriaux et du courrier des lecteurs qui apparaissaient dans ces mêmes numéros.
Les mêmes médias de grande audience, qui parlèrent du "massacre de Jénine", diffusent maintenant le mensonge que plus d’un millier de Gazaouis, dont une importante proportion de femmes et d’enfants, auraient été tués par les Israéliens lors des combats. Et maintenant, un peu tard pour la capacité de concentration du public, on apprend qu’il n’y a eu que 600 victimes et qu’ils étaient avant tout des combattants du Hamas en vêtements civils — ce n’étaient donc ni des civils, ni des femmes, ni des enfants. Zut, alors !
Si l’on compare avec le nombre de morts quotidiens au Darfour et au Congo, on comprend les priorités de ce journalisme de vendus.
Autrefois, certains barbares mangeaient le cœur de leurs ennemis pour s’approprier leur puissance. Aujourd’hui, les barbares se déclarent victimes, espérant ainsi s’approprier le statut moral de ceux qu’ils envient, dénigrent et agressent. Car, après tout, comment une victime pourrait-elle être un tortionnaire ?
Ce week-end, j’ai écrit un article sur la « désinvitation » en tant que modérateur, dont a été l’objet Douglas Murray par la London School of Economics (3). Certains commentaires (18, 31 et 32 par exemple) semblent démontrer que les choses sont en fait plus « compliquées qu’il n’y paraît » et que la LSE n’avait pas vraiment tout à fait tort. Est-ce bien la vérité ? Comme j’ai déjà fait l’expérience d’une « désinvitation » par l’université de Cambridge, qui a ensuite nié les faits, et comme j’ai discuté avec Douglas Murray de ce qui lui est arrivé, je ne crois pas que ce soit le cas.
Ce n’est qu’après que les médias internationaux aient découvert ce qui s’était passé, que cette université du terrorisme et de l’apaisement a essayé de masquer son comportement stupide. Selon Douglas Murray,
« la LSE a désespérément essayé d’éteindre le feu à partir du moment où la presse s’est intéressée à l’incident. Ils ont même essayé de me "réinviter", une heure et demie avant le début de la conférence. Quand on compare leurs premières réponses aux médias et les dernières, il y a une grande différence : ils ont essayé de faire comme s’il n’y avait pas eu le moindre problème. Ils ont été surpris par l’intérêt inattendu des médias pour la question et ils ont essayé de fournir une nouvelle version des faits. C’est assez peu courageux pour une université — à moins que cela ne soit simplement normal !
Le chargé des relations avec la presse a eu fort à faire et a dû écrire à quantité de blogs et de journaux. Mais le Telegraph et l’Evening Standard ont vu les premiers e-mails (que je me fais un plaisir de vous envoyer) qui me « désinvitent » avec les raisons invoquées par les premiers communiqués de presse. De toute manière, il est évident que la LSE est bel et bien un foyer d’extrémisme et a produit un certain nombre de terroristes, dont, notamment, l’assassin de Daniel Pearl. A chaque fois que l’on remarque comment l’extrémisme fleurit dans leur campus, ils sont gênés parce que l’on rend cela public, mais ils ne font jamais rien pour que cela change. Autre exemple ici. » http://www.hurryupharry.org/2009/01/26/lse-student-occupation-ends-in-historic-victory/
Du côté de Cambridge, j’ai été invitée, il y a quelques années par le groupe qui s’occupait des études féministes et sur la différence des sexes (Women’s Studies/Gender Studies), à faire partie des quatre conférenciers invités lors d’un colloque international célébrant leur 10e anniversaire. Pour être tout à fait juste, ils ont loué mon livre, The Death of Feminism. What’s Next In the Struggle for Womens’ Freedom. J’en ai été surprise et j’ai accepté de participer. Mais, par la suite, quand j’ai vu qui étaient les autres invités, je me suis rendue compte que j’allais être instrumentalisée : je ne serai là qu’à titre symbolique, comme la seule critique du système islamique envers les femmes et de l’apartheid religieux, la seule pro-américaine, pro-Israël et pro-démocratie occidentale (une remarque en passant : ces positions font de moi aujourd’hui une « conservatrice ». Il y a quarante ans, avec des positions pour la plupart similaires, j’étais considérée comme une extrémiste).
J’ai dit que je voulais bien venir, même dans ces conditions, mais j’ai demandé à ce qu’on examine la question de la sécurité sur le campus. Ils m’ont rapidement "désinvitée", uniquement pour le colloque international. Ils ont été assez rusés pour me dire qu’à l’avenir, je serai la bienvenue pour parler devant des publics plus réduits et non internationaux. Bien sûr, je n’ai plus jamais entendu parler d’eux.
Douglas Murray ajoute les remarques suivantes :
« l’argument que la LSE tente d’invoquer est que les circonstances internationales ont rendu ma venue impossible cette fois-ci, mais que, dans d’autres circonstances (en temps de paix ?), je serai autorisé à revenir. Il est important de remarquer ce que sont des circonstances « normales » à la LSE.
Le trimestre dernier, je suis intervenu à l’Association Etudiante Juive. L’Association Etudiante Islamique a entendu parler de ma conférence et les a menacés de diverses manières si elle était maintenue. L’Association juive a tenu bon. Ils ont invité l’Association Islamique à assister à la conférence. Cela s’est passé sans heurts et aucun membre de l’association islamique ne m’a provoqué. Certains sont simplement venus s’asseoir en silence avec des enregistreurs (sans me demander la permission ; ils espéraient sans doute que j’allais dire quelque chose qu’ils pourraient remettre en cause. Ils ont été déçus).
Mais dans le numéro suivant du journal étudiant de la LES, il y avait une pleine page, dictée par l’Association Islamique, contenant toute leur propagande, qui m’insultait de manière grotesque et m’accusait, entre autres allégations, d’islamophobie et de racisme. J’ai écrit au rédacteur en chef, aux journalistes et au directeur de publication pour les avertir que je demandais une pleine page de rétractation immédiate sous peine de poursuites pour diffamation. Le numéro d’après contenait la rétractation que je demandais. Voilà donc comment cela se passe à la LSE dans des circonstances "normales".
Aller parler à la LSE la semaine dernière, alors que certains sont irrités par l’opération israélienne, semble donc impossible pour un ami d’Israël. Si j’étais la LSE, je m’occuperais plutôt de sanctionner les étudiants islamistes qui pratiquent l’intimidation que de me contorsionner pour produire des mensonges sur les raisons de l’annulation d’une conférence. »
Ce genre d’incident ne se produit pas qu’à Londres, ou en Angleterre, ou en Europe, mais également aux Etats-Unis. Il faut que les Américains se rendent compte que leurs campus sont également assiégés par des forces islamistes et marxistes-léninistes, dotés de nombreux financements wahhabites saoudiens. Leur point de vue pro-palestinien est devenu dominant. On annule les invitations et on oublie d’inviter certains conférenciers. Il suffit d’être témoin de la colère des manifestations musulmanes et pro-palestiniennes « en faveur de la paix » pour avoir très très peur. A Londres, ce week-end, une manifestation devant l’ambassade d’Israël a mal tourné — comme aux Etats-Unis lors des manifs pour Gaza. J’ai observé la manifestation et j’ai entendu distinctement l’un des manifestants hurler de manière répétée « brutalités policières ! » : les manifestants attaquaient la police désarmée et l’un de leurs dirigeants faisait en sorte de passer pour une victime.
Pendant encore combien de temps allons-nous continuer à marcher dans ce genre de combines et à croire que les mensonges islamistes et marxistes sont la vérité ?
Phyllis Chesler
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Notes du traducteur
(1) Le Dr Phyllis Chesler est professeur émérite en psychologie et études féministes à l’Université de New York. Essayiste, psychologue et expert auprès des tribunaux, elle a vécu à Kaboul, Jérusalem et Tel Aviv. Elle a fondé l’Association for Women in Psychology (1969) et le National Women's Health Network (1974). Elle est professeur associée à l’université de Haïfa et de Bar Ilan. Elle a écrit une douzaine d’ouvrages, dont Women and Madness ; Women, Money and Power ; About Men ; With Child: A Diary of Motherhood ; Patriarchy: Notes of an Expert Witness… Voir son Blogue.
(2) Rashomon est un film d’Akira Kurosawa (1950), adapté d’une nouvelle de Ryunosuke Akutagawa, où l’on assiste au récit d’un meurtre selon les points de vue de quatre témoins, dont le meurtrier et le défunt. (ndt) [Le passage suivant, emprunté à un site de critique cinématographique, rend clair le sens de cette référence : "Lorsque l'on [regarde] un film, on prend souvent pour acquis que les images qui s'y retrouvent suite au montage correspondent à la réalité de l'histoire qui nous est racontée. Au cinéma, l'image ne ment pas: c'est cette croyance de base qui permet au spectateur de ne pas se perdre dans un labyrinthe de suppositions et de contradictions inextricables lorsqu'il [regarde] un film. Or, ce même spectateur écarte, par le fait même, la nature fort souvent subjective de ces images qui épousent parfois le point de vue d'un personnage ou d'un narrateur. Dans cet infini débat sur les caractéristiques et les exceptions de la réalité filmique, Rashomon fait figure de monument de recherche dont une analyse scientifique des subtilités s'avère une tâche presque impossible à mener à terme. Avec Rashomon, Kurosawa fait continuellement mentir ses images et donne au spectateur l'un des rôles-clé de son scénario, celui du juge ayant à distinguer le vrai du faux dans toute cette histoire […] Ce qui a vraiment eu lieu dans cette forêt restera à jamais un mystère, car même la perspective qui peut nous sembler définitive est voilée par le mensonge et la subjectivité." (Extrait du site Panorama-Cinema).
(3) Douglas Murray, directeur du Centre for Social Cohesion devait prononcer en janvier une conférence intitulée « Islam ou progressisme : lequel est l’avenir ? », qui fut annulée « pour raisons de sécurité ». Des membres de Al-Mujaharoun, association pro-terrorisme, n’avaient pourtant pas eu, par le passé, de problème pour être invités à s’exprimer. La London School of Economics and Political Science est l’équivalent britannique de Sciences-Po en France. Une quinzaine de Prix Nobel et une trentaine de chefs d’Etat sont passés par cette école.
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Phyllis Chesler
© Pajamas Media
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Ode sur une urne grecque, John Keats (*)
Epouse du repos, que nul encore n'a ravie,
Soeur de lait du silence et du Temps qui traîne,
Historienne sylvestre, qui plus douce que notre rime
Peux avec ce relief créer un conte mêlé de fleurs,
Quelle légende à franges de feuilles hante tes formes
De dieux ou de mortels ou de tous deux ensemble,
A Tempé ou dans les vallées d'Arcadie?
Que sont ces hommes ou ces dieux? Ces reculs de jeunes filles?
Cette poursuite démente? Cette lutte pour s'enfuir?
Ces flûtes? Ces tambourins? Cette extase sauvage?
Les mélodies que l'on entend sont douces, plus douces
Celles que nul n'entend; c'est pourquoi, tendres flûtes, jouez encore
Non pour l'oreille des sens, mais, plus aimées,
Murmures pour l'esprit des refrains du silence:
Beau jeune homme, sous les arbres, tu ne peux délaisser
Ta chanson, ni jamais ces arbres se dénuder;
Amant hardi, jamais, jamais tu n'auras ton baiser,
Bien que tu triomphes près du but, - mais ne t'afflige pas;
Elle ne peut te fuir, bien que tu restes sans ta joie,
Pour toujours tu l'aimeras, pour toujours elle sera belle.
Oh! heureuses, heureuses branches, qui ne pouvez répandre
Vos feuilles, ni jamais dire adieu au printemps;
Et heureux, ce musicien, à jamais sans lassitude,
Pour toujours chantant des airs pour toujours nouveaux!
Amour encore plus heureux, heureux, plus heureux amour,
Pour toujours chaud, paisible objet de joie,
Pour toujours palpitant et pour toujours jeune;
Bien au-dessus de toutes les passions qui respirent
Et nous laissent un coeur satisfait où la tristesse monte,
Un front brûlant, une langue desséchée.
Qui sont ces hommes venant au sacrifice?
A quel autel printanier, ô prêtre mystérieux
Mènes-tu cette génisse qui mugit aux cieux
Avec cet habit de guirlandes sur ses flancs lisses?
Quelle bourgade, assise près de sa rivière ou de sa grève
Ou construite en colline avec sa calme citadelle,
Est restée vide de son peuple en matin pieux?
O, petite bourgade, pour toujours tes ruelles
Resteront silencieuses; et pas un esprit pour te dire
Pourquoi tu es si désolée, jamais ne pourras revenir?
O formes attiques! attitudes splendides! Avec une dentelle
Ciselée d'hommes et de jeunes filles de marbre,
Avec des branches de forêt, avec l'herbe foulée,
Toi, forme silencieuse, tu nous empoignes et jettes loin de la pensée
Comme le fait l'Eternité: Pastorale froide!
Lorsque le vieux temps saccagera cette génération,
Toi, tu resteras au milieu d'autres malheurs
Que les nôtres, comme une amie de l'homme à qui tu dis:
La Beauté, c'est la vérité; la vérité, c'est la Beauté; sur la terre
Voilà tout ce que vous savez, tout ce que vous avez besoin de savoir.
(Traduction inédite par Armand Robin, datée de septembre 1937.)
Mis en ligne le 2 février 2009, par M. Macina, sur le site upjf.org
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