Bandes de non-droit



Dans un mois ou dans un an, un policier sera tué à l'occasion d'un traquenard banlieusard. Un et puis deux et puis trois. Et puis dix. Alea jacta est. L'histoire est écrite. Selon un rituel immuable.

Tout a commencé il y a trente ans. A chaque fois, la barre est hissée plus haut. On jette une pierre et puis des centaines. On brûle une voiture et puis des milliers. Le soir du Nouvel An, à Strasbourg, et puis tous les soirs, partout. On dépouille les petits bobos pendant la Fête de la musique. Et puis à toutes les manifs. On sort les couteaux, et puis les haches, et puis les marteaux. On tire sur une voiture de police. Et puis on multiplie les traquenards. On sort les pistolets à grenaille, les fusils. Et demain, les kalachnikovs ?

A chaque fois, les médias s'émeuvent, les syndicats de police s'époumonent, les politiques menacent. Les sociologues expliquent doctement que ces jeunes expriment une souffrance, une douleur, un mal-vivre. La faute au chômage, à l'exclusion, aux discriminations. A Voltaire. A Rousseau.

Et tout retombe et tout recommence. Les sociologues poursuivent : «Il n'y a pas de bandes ethniques», c'est-à-dire que des enfants d'immigrés africains se mêlent à des Antillais. On est soulagé. Les policiers reculent. Les territoires « libérés » s'étendent. Les trafiquants de drogue se réjouissent. Plus on dérangera la tranquillité de leurs trafics, plus ils feront monter les enchères de la violence. Ils se pavanent en BMW ; ils menacent, ils rackettent, mais ils protègent aussi et remplissent les Caddies. Ils jouent Scarface tous les jours. «Il n'y a pas de zones de non-droit en France.» Les policiers vont partout. Avec des CRS par dizaines, déguisés en Robocop. Trois petits tours et puis s'en vont. Ils doivent contenir, mais non répliquer. Zéro mort. L'Etat n'a plus le monopole de la violence légitime.


Eric Zemmour pour le Figaro le 21 mars 2009

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