Fouad Alaoui, vice-président de l'UOIF.
Crédits photo : Le Figaro
Cécilia Gabizon
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Au cours de son rassemblement annuel au Bourget, l'organisation proche des Frères musulmans a dénoncé leur «aliénation aux côtés de l'oppresseur israélien».
Longtemps, l'UOIF s'est défendue. Accusée d'importer en France l'islam fondamentaliste des Frères musulmans, dont elle est proche, l'Union des organisations islamiques de France est également soupçonnée de favoriser le communautarisme. Des années de participation au Conseil français du culte musulman ne l'ont pas lavée de ce soupçon. Alors l'UOIF a changé de stratégie. Avec une cible hautement symbolique, le Crif. Les communautaristes ne seraient pas les musulmans, mais bien les juifs regroupés dans le Conseil représentatif des institutions juives de France, martèle à présent l'Union. «Les musulmans de France, à l'instar de l'immense majorité des citoyens ont très mal perçu l'aliénation inconditionnelle des autorités juives de notre pays aux côtés de l'oppresseur israélien», a lancé samedi son vice-président Fouad Alaoui, à l'occasion du rassemblement annuel de l'organisation au Bourget. Il avait opinément placé la question «palestinienne» au cœur de son message. Pour mieux s'en prendre au «projet sioniste» qui repose, dit-il, «sur la négation de la Palestine». Une façon détournée de condamner l'existence même d'un État juif.
Nombreuses accusations
«Cette rhétorique est hélas connue», affirme Richard Prasquier, le président du Crif. «C'est celle du Hamas. N'oublions pas que leur charte ne reconnaît pas Israël et prévoit de tuer les Juifs. Or le Hamas est la branche palestinienne des Frères musulmans et l'UOIF, leur représentant en France. Il y a une logique», assure Richard Prasquier.
Depuis l'offensive israélienne sur Gaza, l'opposition entre propalestiniens et proisraéliens a abandonné le terrain des subtilités diplomatiques pour enflammer la place publique. Le gouvernement a bien tenté d'imposer une réconciliation, alors que les actes antisémites se multipliaient en janvier, mais sans y parvenir. L'UOIF est entrée en campagne, appelant à manifester et affichant sur son site, «une galerie de photos de la barbarie israélienne». En retour, le Crif a, lui, organisé une manifestation de soutien à Israël et fermement critiqué l'UOIF au cours de son traditionnel dîner début mars.
Depuis, les accusations se poursuivent. Comme si le temps du dialogue paisible entre juifs et musulmans était révolu. Dalil Boubakeur, le recteur de la mosquée de Paris, l'ancien président du Conseil français du culte musulman vient d'en faire les frais. Il s'est récemment déclaré «ami des juifs» dans une revue israélienne, suscitant, affirme-t-il, des réactions hostiles dans les pays arabes et jusqu'en France. «La préfecture a autorisé une manifestation vendredi d'un groupe “Cheikh Yassine” devant ma mosquée», se plaint-il. «Affirmer son amitié au peuple juif vous expose aujourd'hui à la vindicte de groupes musulmans», regrette cette figure de l'islam modéré.
L'UOIF a longtemps louvoyé. Depuis sa création, par des étudiants venus du Maghreb en 1983, jusqu'à son intronisation dans le CFCM en 2003, elle a évité les polémiques sur les Juifs et Israël. Elle avait pris ses distances avec Tariq Ramadan, lorsque le prêcheur avait listé et qualifié des intellectuels français, d'intellectuels juifs. Tout comme elle avait désapprouvé, du bout des lèvres, un de ses prédicateurs, Hassan Iquioussen, qui dans une causerie enregistrée avait accusé les juifs de tous les maux. Depuis, Iquioussen comme Ramadan, sont de retour au rassemblement du Bourget. Et l'UOIF qui souffre d'un «complexe du Crif» selon le politologue Vincent Geisser, espère engranger un peu de la notoriété de sa rivale, en l'attaquant. Au risque d'être toutes deux réduites à de simples lobbys communautaires.ter à ma sélection
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